Chef d’entreprise

Comment bien préparer son contrôle fiscal ?

6 min
Écrit par  Cécile d'AGIRIS
19 mars 2020
Comment bien préparer son contrôle fiscal ?
10:26


Une entreprise française a, chaque année, 1 chance sur 15 d’être contrôlée par l’administration fiscale. Evènement normal dans la vie d’une entreprise, le contrôle fiscal n’en demeure pas moins anxiogène. Nous sommes allés à la rencontre d’un ancien vérificateur pour comprendre les bonnes pratiques à adopter dans votre entreprise pour vivre ce moment le plus sereinement possible !

Les principaux déclencheurs d’un contrôle fiscalFEC, factures, et appel au vérificateur : ce qu’il faut préparer avant un contrôle fiscalCollecte des justificatifs et réunion de synthèse : les 2 temps forts d’un contrôle fiscal sur siteCourrier d’observations, interlocution, commission paritaire : les 3 actions possibles pour l’entreprise après le contrôle fiscal

On estime qu’une entreprise subira 9 contrôles fiscaux au cours de sa vie. Sur une population globale de 3 millions d’entreprises en France, le fisc réalise en moyenne chaque année, 162 000 contrôles à distance "par échange de pièces" et 44 000 contrôles "sur site". Le contrôle fiscal fait donc partie de la vie d’une entreprise.
"Coopération, loyauté et bonne organisation comptable" : ce sont les 3 clés souvent citées pour minimiser l’impact d’un contrôle fiscal. Mais, selon un proverbe cambodgien "10 qui savent ne valent pas un qui pratique". C’est pourquoi nous avons interrogé Paskal Treut, ancien vérificateur, qui a pratiqué pendant plusieurs années ces contrôles fiscaux. Il nous explique ce qui déclenche un contrôle fiscal et les bonnes pratiques à adopter avant, pendant et après un contrôle sur site.

Les principaux déclencheurs d’un contrôle fiscal

Les raisons qui déclenchent un contrôle fiscal évoluent.

Auparavant, les contrôles fiscaux étaient presque toujours induits par des incohérences sur les déclarations fiscales des entreprises. L’administration procédait aussi à des contrôles sur des thèmes précis, comme par exemple, le Crédit Impôt Recherche. Pour un faible nombre, les contrôles étaient totalement aléatoires, c’est-à-dire déclenchés par simple désignation d’une entreprise, dans le portefeuille du vérificateur, qui n’avait pas fait l’objet d’un grand nombre de contrôles par le passé.

Aujourd’hui, l’administration essaie de procéder à des contrôles plus qualitatifs et mieux ciblés avec :

  • Les contrôles dits "d’opportunité", c’est-à-dire lorsque des évènements importants impactent la vie de l’entreprise, comme par exemple, un changement de dirigeant ou de siège social.
  • Les contrôles liés au "datamining", c’est-à-dire le croisement des données possédées par les différents services de l’Etat. Finances Publiques, notamment en matière de lutte contre la fraude à la TVA. Ainsi, des marges comptables ou fiscales très inférieures à celles des entreprises comparables sur le même secteur d’activité ou encore une absence / un retard dans les déclarations d’IS ou de TVA peuvent être des déclencheurs de contrôle fiscal.

FEC, factures, et appel au vérificateur : ce qu’il faut préparer avant un contrôle fiscal

L’entreprise reçoit un courrier, une quinzaine de jours avant la date prévue de début du contrôle. Elle peut considérer que son contrôle fiscal commence avec la réception de ce courrier.

Il faut que l’entreprise se prépare au contrôle fiscal à venir, rapidement mais sans panique. Depuis le 1er janvier 2014, les entreprises qui tiennent une comptabilité informatisée ont l'obligation de remettre, lors d'un contrôle fiscal, un support dématérialisé appelé FEC (Fichier des écritures comptables) sous peine d'une amende de 5 000 €.
L’entreprise doit donc récupérer, si elle ne les a pas, les Fichiers des écritures comptables liés aux exercices comptables visés par le contrôle fiscal, ainsi que l’ensemble des factures émises ou reçues durant ces exercices, les relevés de comptes bancaires ou encore les contrats.

L’entreprise peut contacter la personne qui effectuera ce contrôle fiscal : son nom et son numéro de téléphone sont indiqués sur le courrier. De cette façon, l’entreprise pourra obtenir les réponses aux questions éventuelles qu’elle se pose, et cela "personnifiera" le contrôle fiscal. Elle peut en profiter pour sonder le vérificateur sur les problèmes matériels qu’elle aura préalablement identifiés, comme par exemple, le fait que personne n’est présent dans l’entreprise le mercredi, excepté au service production.

À la suite de cet appel, l’entreprise devra contacter son conseil tel que son expert-comptable, si celui-ci n’est pas déjà prévenu. Elle pourra ainsi l’avertir de la date du futur contrôle fiscal, afin qu’il puisse l’assister dès cette date. Elle pourra aussi discuter avec lui du déroulement du contrôle fiscal si elle en éprouve le besoin.

agiris-site-f00-picto-livre-blancTéléchargez notre guide gratuit et découvrez les 3 trésors de gestion qui se cachent dans un bon logiciel de comptabilité :

La compta : une mine d’infos pour anticiper les problèmes de trésorerie, une aide essentielle pour maintenir une relation zen avec vos fournisseurs ...

Collecte des justificatifs et réunion de synthèse : les 2 temps forts d’un contrôle fiscal sur site

L’entreprise ne doit jamais perdre de vue un principe fondamental du contrôle fiscal : c’est elle qui est contrôlée, et donc c’est elle qui est responsable de tout problème révélé par ce contrôle, et non son conseil.

S’agissant des conditions matérielles du contrôle lui-même, bien que l’entreprise n’ait pas d’autres obligations que celle d’accueillir convenablement le vérificateur, elle pourra utilement lui procurer des conditions de travail optimales (bureau, connexion internet…).

Au cours du contrôle, le vérificateur sera amené à demander différents documents à l’entreprise pour approfondir les points du contrôle qui semblent poser problème tels que :
- les factures justifiant des charges,
- les documents permettant de justifier des exonérations.

Le point qui semble important concernant le contrôle est la sincérité de l’entreprise dans ses rapports avec le vérificateur qui mène le contrôle fiscal. Il ne sert à rien de chercher à éluder les demandes faites durant le contrôle. L’entreprise doit garder à l’esprit que les documents que demande le vérificateur doivent permettre de clarifier les questions que celui-ci se pose. Ne pas donner les documents ou ne pas répondre aux questions posées ne ferait que retarder les rappels qui pourront être notifiés par le vérificateur.

À l’issue des opérations de contrôle, le vérificateur doit organiser une réunion de synthèse :

  • L’entreprise vérifiée peut convier les personnes qu’elle souhaite à cette réunion, sans avertir le vérificateur. A minima, l’entreprise a tout intérêt à demander à son conseil d’être présent pour cette réunion.
  • En revanche, le vérificateur ne peut convier que des personnes validées par l’entreprise si elles n’ont pas pris part au contrôle.
  • L’entreprise ne doit jamais découvrir de problème, générant des rappels ou non, au moment de cette réunion de synthèse. C’est pourquoi, même une fois le FEC remis au vérificateur en amont du contrôle fiscal, l’entreprise doit insister pour être tenue au courant des évolutions du contrôle. En principe, tous les rappels doivent avoir été abordés au cours du contrôle avec le dirigeant.
  • Lors de cette réunion de synthèse, le vérificateur doit impérativement présenter au contribuable, la globalité des rappels et pénalités qu’il envisage de notifier.

Le législateur est venu modifier le déroulement de cette fin de contrôle début 2020, le rendant plus contraignant pour le vérificateur, et donc plus protecteur pour les entreprises. Notamment, la formalisation devra être plus importante.

Courrier d’observations, interlocution, commission paritaire : les 3 actions possibles pour l’entreprise après le contrôle fiscal

A l’issue du contrôle fiscal, le vérificateur envoie à l’entreprise une proposition de rectification. La société dispose alors de la possibilité de faire valoir ses observations par courrier. L’administration doit répondre à ces observations, sauf dans le cas où elle les accepte.

Pour faire valoir ses observations, l’entreprise dispose d’un délai de 30 jours qu’elle peut faire prolonger de 30 jours, sur simple demande écrite. L’administration dispose alors d’un délai identique pour y répondre.

À la suite de cette réponse de l’administration, l’entreprise ayant fait l’objet du contrôle peut demander une interlocution à l’administration. Celle-ci sera assurée, en premier lieu, par le supérieur du vérificateur, puis par sa direction de rattachement.

Si à l’issue de cette interlocution, le désaccord persiste, l’entreprise peut saisir une commission paritaire (administration et contribuables). Cette possibilité doit être, d’ailleurs, rappelée par le vérificateur dans tous ses courriers postérieurs au contrôle.

Si la décision prise par cette commission paritaire ne permet pas de mettre fin au désaccord entre l’administration et l’entreprise, celle-ci peut encore présenter ses doléances au contentieux de l’administration. Dans ce cas, le désaccord sera traité par la justice, dans un délai qui peut être long.

Lorsqu’un contrôle fiscal se déroule sans opposition du contribuable, ses conséquences seront d’ordre pécuniaire. Les suites de ce contrôle fiscal seront :
- la correction des erreurs du contribuable ayant eu comme conséquence une perte pour le Trésor public,
- la réclamation éventuelle de pénalités et d’intérêt de retard.

En revanche, si le contribuable rend le contrôle plus compliqué par son attitude durant celui-ci, il risque de se stigmatiser pour l’avenir au regard de l’administration. A titre d’exemple, il sera plus compliqué pour un contribuable ayant précédemment tenté de se soustraire à un contrôle, de faire valoir sa bonne foi dans l’erreur, lors d’un contrôle ultérieur.

Dans le cas où le comportement du vérificateur, ou de l’administration elle-même, nuit au déroulement des opérations de contrôle, le contribuable a la possibilité de saisir les autorités administratives telles que la direction du vérificateur, voire le médiateur de la République, pour mettre un terme à ces agissements.

 
Article co-rédigé avec Paskal TREUT, expert conception ISACOMPTA, ancien vérificateur.

 

 

Retour ressources